samedi 3 avril 2021

Reconquête démocratique de l’habitat

 

Depuis les années 1990, un abandon de l’espace public et privé à des bandes fut pratiqué. Aujourd’hui, certains s’étonnent pourtant des effets de la subornation de témoin sur les populations des quartiers concernés. Une reconquête démocratique est nécessaire.

 


(Bibliothèque de la Manu à Nantes près du siège de la CGL 44)



S’inspirer du modèle d’Archipelia

 

Fondé en 2001, Archipelia est un centre social situé 17 rue des Envierges (75020 Paris, voir https://www.archipelia.org/), près de l’esplanade du haut Bellevelle, juste à côté des 26 et 28 rue Piat. Cette esplanade a longtemps été un haut lieu du trafic de drogue sur Paris.

Archipelia fournit des activités pour la petite enfance, de l’accompagnement scolaire, des activités musicales pour les jeunes, de l’accès au droit (avec écrivains publics), de la formation à l’informatique, de la gestion d’un jardin partagé, des activités autour de la mémoire pour les séniors, des fêtes de quartiers et des rencontres culturelles. Il fut un temps où Archipelia conduisait aussi des opérations d’alphabétisation pour les étrangers.

Cette réussite est un modèle à répandre partout. Chaque immeuble des quartiers populaires de France, y compris en Bretagne, devrait bénéficier de telles activités et pourrait attribuer, en son sein, des espaces à des structures similaires. Ainsi, un flux continu de personnes extérieures au quartier serait convié dans les lieux publics ou communs.

Le primat accordé à ce regard extérieur est l’un des traits les plus intéressants de la mouvance se réclamant de l’habitat participatif, même si l’on peut aussi lui reprocher à la fois la complexité des solutions juridiques proposées (lien) et la diminution des droits des consommateurs (lien). Le meilleur, à savoir l’ouverture aux autres, doit néanmoins être repris. Des rencontres avec des associations d’autres quartiers plus favorisés pourraient, notamment, être régulièrement organisées.

Même si les trafics ne disparaitraient pas comme par enchantement, cela offrirait des perspectives intéressantes autres que l’embrigadement dans des mafias aux populations qui vivent à proximité des trafiquants.

Ces derniers, qui sont certes malhonnêtes, sont tout sauf des imbéciles. Ils ne veulent pas attirer l’attention sur eux-mêmes. Ils ont ainsi appris à laisser tranquilles les bénévoles d’Archipelia, rapidement identifiés, et tous ceux qui viennent à la rencontre du centre social. Et c’est un ancien bénévole, ayant vécu dans le quartier à proximité plusieurs années, qui vous le dit.

 

Éviter le modèle capitulard

 

Malheureusement, certains n’approuvent pas la démarche d’Archipelia.

On se souvient de la délégation de conseillers syndicaux du 28 rue Piat reçue par un élu qui les avait invités à accepter que la police laisse proliférer les trafics de manière apparente pour mieux repérer les dealers.

Dans cette perspective, on abandonne les espaces publics et les parties communes des immeubles privés ou sociaux au contrôle des dealers.

Le résultat final est le moment où un député explique à la télévision qu’il a dû demander l’autorisation d’un dealer pour entrer dans un quartier afin d’y examiner la réalité pour évaluer les financements de l’ANRU (lien).

Certains sont manifestement en train de capituler face aux ennemis de la République, comme les apparatchiks rentiers incompétents du haut commandement et de l’administration française en mai-juin 1940.

Dans de très nombreux immeubles, au lieu de reprendre le modèle qui a marché à Archipelia et de l’approfondir (ce que l’on pourrait faire même dans le quartier de Belleville à Paris), on ne fait strictement rien. Des barres d’immeubles entières existent en marge de la ville sans aucun contact avec le milieu associatif des beaux quartiers et des zones périphériques.

On est ensuite tout surpris d’avoir deux mondes qui se font face, tout en assistant à la décomposition civique de la Nation.

Aussi, les associations agréées de consommateurs compétentes en matière d’habitat doivent prendre leur part dans le combat à mener. Au lieu de pratiquer une participation symbolique ou technocratique, elles se doivent de mettre en place ces activités concrètes au service des habitants, et cela dans un cadre pluraliste, avec des élections à bulletins secrets dans un cadre allant au-delà de l’immeuble, pour éviter tout risque de représailles de la part des dealers. La loi prévoit les valeurs qui doivent être respectées dans le cadre du débat pluraliste nécessaire (article 44 alinéa 1 de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986).

Dans le présent blog, la CGL contribue à son travail d’accès au droit, même si elle peut et doit faire plus immeuble par immeuble.

Ainsi, on pourra valoriser l’activité des militants les plus performants.

 

Inévitable subornation

 

Hélas, les barons de la drogue les mieux organisés n’auront aucun souci avec l’évolution préconisée ci-dessus. Au contraire. La disparition des espaces dont s’emparaient des jeunes désœuvrés dans des quartiers difficiles diminuera le nombre de lieux de ventes incontrôlés.

Cela ne signifiera pas que le trafic diminuera. Il s’adaptera en adoptant un modèle tupperware ®. Surtout, les lieux de vente se concentreront dans l’habitat privé difficile où les locataires sont bien moins facilement organisés.

On doit alors parler de l’alliance objective entre marchands de sommeil et trafiquants de drogue, et surtout préparer la riposte nécessaire.

Toute une génération de propriétaires dénués de scrupules s’est emparée de quartiers entiers (voir Les Marchands de sommeil. Sont-ils les seuls coupables ? p. 31). Ce sont des centaines de milliers de personnes et leurs familles qui violent la loi et qu’il faudrait punir. Le fera-t-on vraiment ?



Sur internet, les marchands de sommeil tentent même de s’arroger le monopole de l’information juridique sur divers forums, laissant les questions gênantes pour eux sans réponse et harcelant tout intervenant hors de leur contrôle.

Inspirés par leurs alliés barons de la drogue, les marchands de sommeil n’hésitent pas à pratiquer la subornation de témoins (réprimée par l’article 434-15 du Code pénal) afin d’intimider ceux qui évoquent des délits commis.

Là encore, le rôle des associations agréées comme la CGL est important. Elles doivent souligner combien un véritable accès au droit est incompatible avec l’anonymat des délateurs (lien), avec l’usurpation de l’identité de professionnels établis (lien) ou avec la pratique des discriminations (lien). Rejoignez la CGL qui est à la pointe de ce combat !

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